Hommages

Le Festival International du Film d’Amiens rendra hommage Ă  Alain Cavalier en sa prĂ©sence ! Dix films pour (re)dĂ©couvrir son oeuvre dans laquelle il expĂ©rimente toujours, s’Ă©merveille, invente souvent avec la fraĂ®cheur d’un enfant, sacralise avec simplicitĂ© le monde sur lequel il pose un oeil attentif et gĂ©nĂ©reux.

Seul au sens d’unique, de singulier, Alain Cavalier l’est. Dans son ĂŞtre comme dans son parcours cinĂ©matographique. De son vrai nom Alain FraissĂ©, il est nĂ© au coeur de la « douce France » Ă  VendĂ´me en 1931,  mais son terreau intime s’est essentiellement nourri des angoisses de la guerre, de l’image du  père et d’une rigoureuse Ă©ducation religieuse, trois Ă©lèments que l’on retrouve d’une manière ou d’une autre, tout au long de son « étrange voyage » en cinĂ©ma. Etudiant en Histoire il bifurque rapidement vers les chemins du 7ème art et l’I.D.H.E.C. Mais l’interrogation sur l’Histoire, le Pouvoir et la manipulation sera rĂ©currente dans son oeuvre, de la guerre d’Algèrie avec Le combat dans l’Ă®le en 1962, puis L’insoumis en 1964 (film retirĂ© de l’affiche au bout d’une semaine et longtemps interdit, et Ă  ce jour l’un des plus beaux rĂ´les d’Alain Delon) jusqu’Ă  la rĂ©flexion ludique, et toujours d’actualitĂ©, sur la gouvernance « intègre » d’un pays (Pater avec Vincent Lindon en 2011).

Ses 1ères armes c’est auprès de Louis Malle (auquel le FIFAM a rendu hommage en 2016) qu’il les fera en tant que 1er assistant rĂ©alisateur sur « Ascenseur pour l’Ă©chafaud » et « Les amants ». Cela sera sensible dans sa 1ère rĂ©alisation Le combat dans l’Ă®le. Un cinĂ©ma d’auteur exigeant et engagĂ© mais inscrit dans les codes d’un cinĂ©ma commercial, avec des acteurs vedettes (ce qu’il nommera plus tard les « corps glorieux », en opposition aux « corps innocents » des non-acteurs) comme Romy Schneider, Jean-Louis Trintignant, et, plus tard, Alain Delon dans « L’insoumis ». Deux premiers films dont les dĂ©mĂŞlĂ©es  avec la censure ne favoriseront pas la rencontre avec le public. Il se tournera alors avec un certain bonheur vers l’univers du polar avec l’Ă©tonnant « Mise Ă  sac »  puis une adaptation de Françoise Sagan, avec Catherine Deneuve, « La chamade » en 1968. Beau succès. Vient alors la rupture, inattendue, un changement de cap radical. La perte de sa femme, la comĂ©dienne Irène Tunc, dont il Ă©tait profondĂ©ment amoureux, le plonge dans une insondable dĂ©pression, introspection et  nourrit sa rĂ©flexion. Son cinĂ©ma ne sera plus jamais pareil (il lui consacrera en 2008 un film d’une sincĂ©ritĂ© bouleversante : Irène.)

Après ce deuil indĂ©libile et charnière, suit un long silence dont il sortira avec un film « libre de ton » coĂ©crit en osmose avec ses comĂ©diens « Le plein de super ».  Revitalisant.  Comme en contrepoint il se mettra Ă  nu, douloureusement, toujours en recherche, s’autodĂ©truisant pour mieux renaĂ®tre (« Ce rĂ©pondeur ne prend plus de messages »). Cette alternance lumière/nuit sera souvent la caractĂ©ristique de ses oeuvres suivantes, marquant de plus en plus son dĂ©sir de filmer au plus près des ĂŞtres, des corps, des sentiments. CĂ´tĂ© sombre l’Ă©prouvant Libera me, cĂ´tĂ© lumière  Martin et LĂ©a en 1979 un des plus beaux films sur l’intimitĂ© d’un couple (thème clĂ© chez Cavalier, il y reviendra en  1996 avec La rencontre). Mais c’est avec ThĂ©rèse, vĂ©ritable Ă©pure consacrĂ©e Ă  la vie de Sainte ThĂ©rèse de Lisieux (couronnĂ© par 6 CĂ©sars et le Prix du Jury Ă  Cannes) qu’il touche le coeur du public avec la complicitĂ© d’une lumineuse Catherine Mouchet. Cavalier retrouvait lĂ  au scĂ©nario sa fille Camille de Casabianca avec laquelle il avait donnĂ© naissance prĂ©cĂ©demment Ă  cet intime « road-movie ferrovière » Un Ă©trange voyage (Prix Louis Delluc 1980).

L’arrivĂ©e du numĂ©rique acheva la mue d’Alain Cavalier, lui permettant de s’affranchir de la technique, d’ĂŞtre en osmose avec son Ă©conomie de vie, son ascèse personnelle, de devenir cet homme-camĂ©ra, ce « filmeur » comme il se dĂ©finit lui-mĂŞme, ce tĂ©moin chaleureux et attentif de la vie des autres et de la sienne (donc de la nĂ´tre). A 86 ans il expĂ©rimente toujours, s’Ă©merveille, invente souvent avec la fraĂ®cheur d’un enfant, sacralise avec simplicitĂ© le monde (hors consommation !) sur lequel il pose un oeil attentif et gĂ©nĂ©reux (ainsi que sa voix Ă  la douceur envoutante). Comme dans Le Paradis rĂ©alisĂ© en 2014.

DĂ©cidĂ©ment  Frère Alain (documentaire que Vincent Dieutre lui a consacrĂ©) s’est approchĂ© au plus près de l’essence de l’humain, en lui comme en nous. Et la quĂŞte n’est pas finie. Et si c’est en Cavalier seul qu’il la poursuit, assurĂ©ment ce n’est pas seul contre tous mais seul avec tous.

Jean Pierre Bergeon

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Marta RodrĂ­guez ethnologue et cinĂ©aste a construit une Ĺ“uvre vaste et engagĂ©e depuis plus de 50 ans. « Tengo un compromiso », « j’ai un engagement », voilĂ  une expression qui revient souvent dans ses conversations. Engagement avec les indiens dns les territoires dĂ©vastĂ©s par la guerre ou les dĂ©foliants, avec les paysans spoliĂ©s de leurs terres, avec les femmes exploitĂ©es des plantations de fleurs, les enfants victimes des mines ou encore les personnes dĂ©placĂ©es par la guerre civile.

« Il faut rester longtemps dans les communautĂ©s, partager leur vie au jour le jour pour pouvoir la raconter ». La dĂ©marche est aussi ethnologique. Il a fallu cinq annĂ©es pour faire Les Briquetiers. C’est aussi l’histoire d’une amitiĂ© puisque « cette famille est devenue ma famille »

Nous présenterons 4 films tournés avec son mari, le grand photographe Jorge Silva, décédé en 1988, et pour nourrir  l’hommage qui lui est rendu nous présenterons également le film Transgression de Fernando Restrepo Catstañeda qui lui est consacré.
Marta Rodriguez poursuit son travail et  prépare  un nouveau documentaire, La Sinfonía de los Andes, consacré aux enfants indigènes nasa victimes du conflit armé.

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Hommage à Jonathan Demme par Michelange Quay

Jonathan Demme m’a contactĂ© après la sortie de mon film, Mange ceci est mon corps, et m’a invitĂ© Ă  venir Ă  New York prĂ©senter le film avec lui.

Il Ă©tait heureux d’y trouver la puissance de quelque chose liĂ© a HaĂŻti sur l’Ă©cran.

Il lui semblait retrouver dans le film, son ami disparu, Jean Dominique, grand cinéphile qui avait fondé des ciné-clubs et a même ajouté que “Jean Dominique devait faire un breakdance au ciel » en voyant ce film depuis là-haut.

En rĂ©flĂ©chissant Ă  cette rencontre, je me souviens d’un homme passionnĂ© par HaĂŻti et la crĂ©ativitĂ©. Jean Dominique et lui partagaient une mĂŞme mission, une mĂŞme vocation, plus large et plus puissante qu’eux. Quand je pense Ă  sa dĂ©votion pour l’art haĂŻtien et pour la crĂ©ativitĂ© en gĂ©nĂ©rale, l’innocence et l’enthousiasme avec lequel il parlait, filmait et pensait, je suis touchĂ© de l’avoir connu, et de sentir que nous sommes mus par une formidable danse qui s’exprime devant nos yeux, mais dont la source est aussi invisible que la joie et l’amitiĂ©.

Jonathan DEMME filmographie sélective

  • 1974 5 femmes Ă  abattre
  • 1984 Stop making sense
  • 1986 Dangereuse sous tous rapports
  • 1981 Le silence des agneaux
  • 1998 Beloved
  • 2016 Justin Timberlake

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CHAPEAU BAS MONSIEUR ROCHEFORT ! Il s’ennuyait tellement dans sa bonne ville de Nantes qu’il dĂ©cida de devenir saltimbanque… Le Conservatoire devait le lier Ă  vie Ă  Noiret, Marielle, Belmondo, « sa bande ». Le théâtre lui donna ses premières joies en servant Harold Pinter ou Pirandello. Au cinĂ©ma il fut longtemps un brillant second rĂ´le avant d’exploser (comme son rire) dans des compositions souvent « gravement drĂ´le » ou « drĂ´lement grave ». Quelques CĂ©sars au compteur (dont un pour l’ensemble de sa carrière) il a su alterner films d’auteurs et « grand public », jeunes cinĂ©astes et talents reconnus pour lesquels il est souvent devenu « leur acteur fĂ©tiche » (Philippe De Broca, Patrice Leconte, Bertrand Tavernier, Yves Robert….). Ă€ 87 ans , ce Don Quichotte a tirĂ© sa rĂ©vĂ©rence, forcĂ©ment avec classe.

Trois réalisateurs lui rendront hommage pendant ce Festival :

  • Alain Cavalier avec Un Ă©trange voyage
  • Patrice Leconte avec Les VĂ©cĂ©s Ă©taient fermĂ©s de l’intĂ©rieur et Le Mari de la coiffeuse
  • Philippe Le Guay avec Floride (son dernier film)

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On cĂ©lèbre cette annĂ©e le centième anniversaire de la naissance de Jean Rouch. IngĂ©nieur des ponts et chaussĂ©es, ethnographe, anthropologue, cinĂ©aste, poète, il nous a laissĂ© en hĂ©ritage plus de 180 films, des ouvrages inĂ©galĂ©s sur les religions africaines, des photographies, des Ă©crits et mĂŞme une pièce de théâtre…

Jean Rouch repose depuis 2004 à Niamey, dans ce pays, le Niger, qu’il avait découvert tout jeune et qu’il avait adopté, un petit paradis sur terre comme il aimait à le dire.

A Paris, il Ă©tait un « maĂ®tre », une personnalitĂ© reconnue de tous, Ĺ“uvrant sans relâche, au sein du ComitĂ© du film ethnographique, du CNRS, de la cinĂ©mathèque française, de l’Unesco… Il a renouvelĂ© l’anthropologie visuelle et l’approche documentaire, inventĂ© le cinĂ©ma direct, ouvert des voies originales Ă  la fiction, filmant camĂ©ra Ă  l’épaule avec une Ă©criture filmique inĂ©dite, stimulant la Nouvelle Vague comme l’a Ă©crit Jean-Luc Godard.

En Afrique, Jean Rouch avait trouvé des amis et une vraie liberté il aura été également un des premiers à évoquer les migrations, les villes mondes, les pulsations des indépendances. Provocants, subversifs parfois, beaucoup de ses films furent le fruit d’un travail en commun, élaboré avec sa bande de camarades au Niger, ou en Côte d’Ivoire. Bricoleur de génie, dénicheur de talents, amoureux de l’Afrique et des images, Rouch reste un des grands passeurs de la modernité.

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