Edito C’est un jeu d’échelles qui guide cette édition du FIFAM, là où le monumental croise l’intime dans des programmations qui se répondent, se complètent et parfois se contredisent.

Le collectif devient alors un point de jonction du grand et du petit, de l’intérieur et du public, posant la question de la place de l’individu dans un groupe, dans une société et même sur l’ensemble de la planète. Expérience collective par excellence, le cinéma doit pouvoir se faire le reflet de ses propres contradictions et surtout, de sa capacité à proposer des réponses aux questions qui traversent le monde.

D’abord, il y a la ville en mouvements qui s’impose comme autant de décors vivants qui dépassent la simple somme d’individus. Les villes incitent les rencontres fortuites, se font les miroirs labyrinthiques aux errances des personnages ou les observatrices des métamorphoses entre le jour et la nuit. Elles sont aussi celles qui se font et se défont selon les logiques industrielles ou les impulsions étatiques et dont les souvenirs se heurtent à l’altération. Ce sont celles, imaginaires parfois, qui laissent entrevoir un monde urbain total. Et ce sont celles dont nous sommes exclu·e·s, à la périphérie, derrière les checkpoints ou sous les bombardements.

Puis viennent les personnes qui ont décidé de filmer collectif, remettant au passage en question la hiérarchie normalisée du tournage, pour se faire porte-paroles d’une idée, d’une lutte ou tout simplement d’une vitalité commune. Autant d’îlots de filmeur·euse·s/filmé·e·s qui vont penser le monde autrement pour faire émerger des images-témoins de leurs actions.

Mais pour réfléchir le monde qui nous entoure, il faut parfois opérer un bouleversement complet d’échelles. Si elle avait pu se faire l’écho d’une fatalité, la programmation Douce Apocalypse est en fait une invitation à un voyage sensoriel vers l’étrange. Le film de genre, ici d’anticipation, parfois relégué à la marge, porte le message de questionnements pourtant bien actuels. Ce ne sont pas les ruines que nous traversons mais ce qui en pousse, là où l’humain n’est plus au centre mais fait partie d’un tout.

Puis, et pour confirmer que cette édition est une invitation à créer ensemble et à se tourner vers l’autre, nous sommes ravi·e·s d’accueillir deux invité·e·s qui passeront plusieurs jours au festival. Ainsi, Agathe Bonitzer a imaginé une carte blanche « Grandes & petites amies » qui témoigne de la sororité comme moyen de vie, et de survie peut-être. Enfin, nous rencontrerons un cinéaste rare mais important de la marge et de la radicalité : Nick Deocampo. Une plongée intime dans un monde alternatif qui, pourtant, se fait le porte-parole d’une contre-culture prête à se défaire de la dictature aux Philippines dans les années 80. L’occasion de découvrir un cinéma parfois inédit en France aux côtés du cinéaste et de la programmatrice Annabelle Aventurin.

Ensemble, spectateur·ice·s, invité·e·s, équipe du festival, de passage ou habitué·e·s, formons le temps de quelques jours une communauté pour imaginer, à travers le cinéma, de nouvelles perspectives joyeuses.

Alexandre Levaray
Directeur artistique